Fluctuations brutales de température, un phénomène en pleine accélération
La réponse provient d’une récente étude publiée dans Nature Communications, qui révèle que « le dérèglement climatique ne se manifeste pas uniquement par l’augmentation de la fréquence des vagues de chaleur ou de froid extrêmes. Il engendre également un phénomène encore peu connu mais particulièrement préoccupant : la multiplication des fluctuations rapides de température. Ces variations brutales, survenues en l’espace de quelques jours voire d’une seule journée, traduisent une instabilité climatique de plus en plus marquée ».
Des transitions thermiques soudaines, de plus en plus fréquentes
Par «fluctuations rapides», les scientifiques désignent des changements extrêmes de température sur une très courte période, généralement de 1 à 7 jours. Ces phénomènes mettent à rude épreuve les écosystèmes, les infrastructures et la santé humaine.
Parmi les cas emblématiques figure l’épisode survenu dans les Rocheuses américaines en septembre 2020 : une journée a suffi pour passer d’une chaleur écrasante à d’importantes chutes de neige, provoquant coupures de courant, perturbations des transports et dégâts matériels. Un autre exemple marquant s’est produit en Europe en avril 2021, lorsqu’un redoux printanier a été brutalement suivi par une vague de froid, provoquant des pertes massives dans les cultures fruitières.
Ces événements, autrefois considérés comme exceptionnels, tendent désormais à devenir plus fréquents, plus intenses et plus courts, selon ladite étude.
Une étude mondiale révèle une tendance alarmante
Menée par l’Université de Guangzhou, en collaboration avec des chercheurs du Canada, de Chine et des Etats-Unis, l’étude s’appuie sur des données collectées entre 1961 et 2020. Elle révèle que plus de 60% des régions analysées ont connu une hausse significative de ces fluctuations rapides. L’Europe occidentale, l’Asie du Sud-Est, l’Amérique du Sud et l’Afrique figurent parmi les zones les plus touchées.
Wei Zhang, professeur adjoint de climatologie à l’Université d’Etat de l’Utah et coauteur de l’étude, rapporte le site tameteo.com/, souligne que ces transitions extrêmes réduisent la capacité des populations et des écosystèmes à s’adapter : « Ce n’est pas simplement une vague de froid ou de chaleur à gérer, mais une instabilité constante. L’impact de ces transitions peut se propager en cascade, affectant l’ensemble des systèmes naturels et humains».
Les projections sont inquiétantes : d’ici à la fin du siècle (2071-2100), la fréquence de ces événements pourrait croître de 6,7% à 8% par rapport à la période de référence 1961-1990. L’intensité des changements s’accroîtrait également (+7,1% à +7,3%) tandis que leur durée diminuerait (−2,5% à −3,2 %).
Des variations de plus en plus fréquentes et intenses
Le Maroc, comme une grande partie du bassin méditerranéen, est particulièrement exposé aux effets du changement climatique. Parmi les signes les plus préoccupants observés ces dernières années figurent les fluctuations brutales de température, c’est-à-dire des transitions rapides entre des épisodes de chaleur et de froid sur de très courtes périodes (quelques jours, voire quelques heures).
Ce phénomène, longtemps considéré comme rare ou anecdotique, devient de plus en plus courant et intense. On observe par exemple des passages soudains d’un temps printanier à des conditions hivernales ou des hausses de température inattendues en plein hiver. Ces changements bousculent les équilibres naturels et sociaux.
Le Maroc, situé entre l’influence océanique, le désert saharien et les systèmes méditerranéens, est une zone de transition climatique sensible. Cette position géographique le rend plus vulnérable aux mouvements soudains d’air chaud ou froid.
Des conséquences multiples sur les écosystèmes et les sociétés humaines
Les impacts de ces fluctuations rapides de température sont multiples et souvent dramatiques. Les périodes de transition soudaines peuvent endommager irrémédiablement les cultures, comme lors des gelées tardives survenues après un redoux ; désarçonner les cycles biologiques des espèces végétales et animales, avec des effets durables sur la biodiversité et surcharger les réseaux électriques, sollicités à la fois pour le chauffage et la climatisation dans des laps de temps très courts.
Les pays à faibles revenus sont particulièrement vulnérables. Leur accès limité aux systèmes d’alerte et leur faible résilience infrastructurelle les exposent davantage à ces dérèglements.
Un phénomène sous-estimé, au cœur des enjeux climatiques futurs
Pour Víctor Resco de Dios, professeur à l’Université de Lleida en Espagne, cette instabilité croissante du climat est l’un des visages les plus pernicieux du changement climatique :
«Le système climatique se dérègle, et cette déstabilisation se traduit non seulement par des événements extrêmes plus fréquents, mais aussi par une plus grande volatilité des températures». Selon lui, l’année écoulée illustre parfaitement cette tendance, avec des allers-retours incessants entre les saisons, y compris dans les zones tempérées : « C’est un aspect du changement climatique qui a longtemps été ignoré. L’étude publiée est l’une des premières à le documenter rigoureusement à l’échelle mondiale».
Hassan Bentaleb
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