En effet, il existe un principe selon lequel les mesures autoritaires fleurissent dans les systèmes politiques en temps de crise, même celles prévues pour être temporaires et qui se transforment en institutions durables. C’est dire que l’Amérique traverse aujourd’hui une période difficile qui lui a fait perdre son leadership économique voire politique. Quand Trump parle de rendre à l’Amérique sa puissance, et en fait même son slogan électoral, il reconnaît implicitement que son pays est en perte de vitesse face notamment à la Chine. Ce déclin est attesté par une récession économique qui touche l’ensemble de la population américaine. Car même si l’empire américain reste la première puissance militaire et économique, il est en train de s’effondrer.
Plusieurs indices indiquent que l’autoritarisme gagne du terrain au sein de ce pays, où l’on suppose que la démocratie était bien établie. La conséquence fut la restriction de la liberté d’expression au nom de la lutte contre l’antisémitisme, le renforcement du protectionnisme, la purge des institutions culturelles au motif qu’elles sont très solidaires avec la Palestine, la banalisation de la répression policière par les arrestations au sein des universités ayant appelé au boycott d’Israël, l’atteinte à la crédibilité des institutions internationales et à leur tête l’ONU. Les régimes autoritaires devraient se réjouir de cette dérive puisqu’ils ne sont plus les seuls dans la ligne de mire des défenseurs des droits de l’Homme ! Faut-il s’étonner que les mandats d’arrêt émis par la Cour pénale internationale contre Netanyahou et son ex-ministre de la guerre, pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, n’aient pas eu d’effet sur la pratique génocidaire d’Israël? La politique de Netanyahou fait fi des règles du droit international.
Et pourtant, l’Amérique de Trump vient de franchir un pas dans le découplage sino-américain, par son interdiction au grand fabricant des puces de l’IA «nvidia» de vendre des microprocesseurs. Acte qui a conduit au déséquilibre des marchés financiers, en provoquant un recul de l’action de cette entreprise de 6,9, aggravé par la réaction du président chinois qui a tenu tête à Trump, en accentuant le coût pour les Etats-Unis. S’ensuit une sortie du président chinois Xi Jinping plutôt renforcé de son duel avec Donald Trump dans la guerre commerciale déclenchée par ce dernier, puisqu’il a permis à Pékin de s’afficher comme une puissance plus responsable et clairvoyante.
Néanmoins, on pourrait mettre à l’actif de Trump le fait que les règles du jeu politique ont été largement dévoyées, puisque nous nous sommes rendu compte que le droit n’était qu’un leitmotiv devant servir les intérêts propres des Américains, ce qui explique la mise hors-jeu du reste du monde, y compris les alliés européens traditionnels de l’Amérique, puisqu’il ne croit plus (avait-il jamais cru?) aux idéaux dont il se réclame! Contrairement à ce que l’on peut penser – a priori- Trump n’est pas politiquement pragmatique puisque ses propositions sur l’Ukraine, Gaza et le nucléaire iranien n’ont pas produit jusqu’à présent l’effet escompté. C’est pour cette raison que son désir de réhabiliter à tout prix l’Amérique des faucons n’a pu résister à l’épreuve de la réalité. Pire, avec son soutien inconditionnel à Netanyahou qui, obnubilé par le mythe du grand Israël, projette un nettoyage de la bande de Gaza par l’extermination des enfants et des femmes ou leur déplacement, sans aucune considération du droit international.
Toutefois le système de terreur instauré par ce dernier sur la bande de Gaza, quelle que soit notre attitude vis-à-vis de l’idéologie de Hamas, ne peut et ne doit se limiter à l’indignation exprimée par les Européens, qui restent divisés sur le terme de génocide, alors que l’on y relèverait les mêmes critères, tels que définis par l’ONU concernant la pratique militaire de l’armée israélienne. Les dirigeants de Tel Aviv refusent l’usage de ce terme à propos des Palestiniens, estimant en être les seuls dépositaires. Les Européens, qui n’ont pu guérir de leur sentiment de culpabilité historique, continuent de traîner derrière eux ce lourd fardeau contre vents et marées, au point d’ignorer leur propre opinion publique qui n’a cessé de dénoncer la politique israélienne en clamant haut et fort «free Palestine».
Il s’avère, comme le rapportent certains journalistes, que cette politique d’instrumentalisation de l’antisémitisme n’est pas automatiquement liée aux craintes des intimidations qui pèseraient sur les juifs mais vise essentiellement à stopper les critiques d’Israël et des organisations juives américaines les plus conservatrices, qui sont de moins en moins populaires au sein de la jeunesse américaine.
Par Mohamed Gallaoui
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