A 70 ans, le leader de l’extrême droite dans le plus grand pays d’Amérique latine, récemment contraint de porter un bracelet électronique, est soupçonné de faire pression sur l’issue de son procès via ses soutiens sur les réseaux sociaux
C’est en invoquant un « non-respect réitéré » de décisions de justice que le juge Alexandre de Moraes, en charge de son procès, a ordonné lundi son assignation à résidence.
« La justice est aveugle, mais elle n’est pas idiote », a tonné ce magistrat de la Cour suprême, honni de l’ancien chef d’Etat (2019-2022).
A 70 ans, le leader de l’extrême droite dans le plus grand pays d’Amérique latine, récemment contraint de porter un bracelet électronique, est soupçonné de faire pression sur l’issue de son procès via ses soutiens sur les réseaux sociaux.
Celui que ses partisans surnomment « le Mythe » a clamé son innocence en juin devant la Cour suprême.
« Un coup d’Etat, c’est une chose abominable », a-t-il lancé. Il est accusé de conspiration en vue d’empêcher le retour aux affaires de son grand rival de gauche Luiz Inacio Lula da Silva, son tombeur au scrutin de 2022 et actuel chef de l’État.
C’est à coup d’outrances verbales, mais aussi grâce à une profonde intuition du virage conservateur de la société brésilienne, que Jair Bolsonaro avait accédé aux sommets.
Né le 21 mars 1955 dans la région de Sao Paulo, dans une famille d’origine italienne, Jair Bolsonaro a eu cinq enfants avec trois femmes différentes.
Les quatre premiers se sont lancés en politique. De la dernière, l’unique fille, Laura, il a dit qu’il l’a engendrée dans un moment de « faiblesse ».
Avec ses enfants et sa dernière épouse Michelle – une fidèle évangélique âgée de 27 ans de moins que ce catholique -, il forme un clan redoutablement efficace.
Par ses contacts entretenus avec l’administration Trump, l’un de ses fils, Eduardo, revendique d’avoir joué un rôle dans les sanctions lancées en juillet par Washington contre le Brésil.
Jair Bolsonaro a en effet reçu un renfort considérable en la personne de Donald Trump.
Référence avouée de l’ancien chef d’Etat brésilien, qui le qualifie d' »ami », le président américain a annoncé des surtaxes douanières punitives, en représailles à une présumée « chasse aux sorcières » contre lui. Et son administration a décidé de sanctions contre le juge Moraes.
Capitaine de l’armée à la retraite, M. Bolsonaro n’a jamais renié les années de plomb de la dictature militaire (1964-1985), dont « l’erreur a été de torturer et non de tuer » les dissidents.
Cette déclaration datant de 2016 illustre son style, fait aussi de sorties misogynes, racistes ou homophobes.
Elu député continûment à partir de 1991, il reste longtemps peu en vue. Il sort de l’ombre après la destitution en 2016 de la présidente Dilma Rousseff, héritière politique de Lula.
Ses diatribes contre la corruption, la violence, la crise économique et la gauche « pourrie » séduisent.
Ce populiste à la syntaxe approximative, qui aime à se présenter en Brésilien ordinaire en short et maillot de foot, s’est habilement assuré le soutien des puissants lobbies de l’agronégoce et des évangéliques.
Durant la campagne présidentielle de 2018, il est poignardé en plein bain de foule. L’attentat lui vaut de graves blessures à l’abdomen et des hospitalisations encore fréquentes.
Son tumultueux mandat est émaillé de crises, malgré un bilan économique plutôt positif.
Sa gestion de la pandémie de Covid-19 donne lieu à d’intenses bras de fer avec la Cour suprême.
Qualifiant de simple « grippette » le virus qui fera près de 700.000 morts au Brésil, il s’est opposé au confinement et a ironisé sur des vaccins qui, selon ses dires, risqueraient de « transformer en crocodile ».
Climato-sceptique, il a laissé la déforestation en Amazonie bondir.
Au deuxième tour en 2022, Jair Bolsonaro perd d’un cheveu. Groggy, il rejoint la Floride deux jours avant la fin de son mandat.
Mais le 8 janvier 2023, une semaine après l’investiture de Lula, des milliers de sympathisants bolsonaristes prennent d’assaut les sièges des institutions à Brasilia, dénonçant une fraude électorale et appelant à une intervention militaire.
Déjà inéligible jusqu’en 2030 pour ses attaques sans preuve sur la fiabilité des urnes électroniques, Jair Bolsonaro sera fixé sur son sort judiciaire dans quelques semaines.
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