Le Groupe socialiste-Opposition ittihadie dénonce une politique éducative à deux vitesses : Khaddouj Slassi appelle à une réforme équitable

Le Groupe socialiste-Opposition ittihadie dénonce une politique éducative à deux vitesses : Khaddouj Slassi appelle à une réforme équitable
Anwarpress FR mercredi 9 avril 2025 - 21:39
À la Chambre des représentants, le débat autour de l’éducation a récemment retrouvé sa gravité la plus profonde, porté par les voix affirmées de deux députées du Groupe socialiste-Opposition ittihadie. Dans une double intervention, Khadouj Slassi et Majida Chahid ont mis en lumière deux visages d’un même chantier national : la transformation de l’école publique marocaine. Entre la généralisation controversée des écoles dites de la «Riada» (écoles pionnières) et la situation préoccupante des écoles traditionnelles (madaris atiqa), c’est toute la cohérence et la justice du système éducatif marocain qui se retrouvent aujourd’hui interpellées.

Les écoles pionnières, promesses et fractures

Dans l’hémicycle, l’intervention de Khadouj Slassi visait à faire la lumière sur la stratégie du ministère de l’Éducation nationale, du préscolaire et des sports, notamment concernant la généralisation des écoles dites de la «Riada».

Ces établissements, qualifiés de pionniers, ont pour ambition de remédier aux carences structurelles de l’école publique marocaine : baisse du niveau des apprentissages, désengagement des élèves, formation peu adaptée aux défis contemporains. En théorie, le modèle des écoles « Riada » incarne une tentative de rupture, un laboratoire d’expérimentation pour une école plus performante et mieux encadrée.

Mais à y regarder de plus près, les éloges cèdent le pas à des interrogations fondamentales. Car derrière cette façade de progrès, la députée ittihadie a mis le doigt sur des préoccupations majeures, qu’aucune réforme digne de ce nom ne peut ignorer. D’abord, le coût : faramineux, il absorbe des ressources sans garantir un bénéfice équitablement partagé. Ensuite, la méthode : dans ces écoles, les enseignants perdent en autonomie, corsetés par un modèle pédagogique uniformisé, rigide, parfois inadapté à la réalité de leurs classes.

Plus grave encore, selon la députée, l’initiative risque de creuser davantage les inégalités déjà béantes au sein du système éducatif. Après la fracture entre écoles privées et publiques, en voilà une nouvelle qui s’annonce : celle entre les écoles publiques elles-mêmes, opposant établissements d’élite et écoles ordinaires. Ainsi, le principe d’égalité d’accès au savoir se voit mis à mal dans ce qu’il devrait protéger : l’école publique comme vecteur d’ascension sociale et de cohésion nationale.

C’est donc avec rigueur que Khadouj Slassi a demandé des clarifications au ministre : quand cette généralisation sera-t-elle effective ? Et surtout, avec quels moyens ? Le gouvernement dispose-t-il des ressources financières suffisantes pour assurer, d’ici la fin de son mandat, un accès égal à ces écoles « Riada » à tous les élèves du pays, y compris dans les provinces les plus reculées ?

Les écoles traditionnelles, mémoire éducative en déshérence

A ce tableau d’un présent réformé sans garanties d’équité, Majida Chahid, également députée itthadie, a opposé le miroir d’un passé vivant mais délaissé. En interpellant le ministre des Habous et des Affaires islamiques, elle a porté à la tribune une question trop souvent tenue à la marge des débats : celle de la situation des cadres des «madaris atiqa», ces écoles traditionnelles qui participent depuis des siècles à la transmission du savoir religieux, linguistique et culturel marocain.

L’enseignement traditionnel, rappelait la députée, n’est pas une relique : il reste aujourd’hui une réalité vivace, fréquentée par des milliers d’apprenants de tous âges et de toutes régions. Il est le gardien d’un héritage intellectuel, moral et civilisationnel inestimable, ancré dans l’histoire du pays. Et pourtant, il souffre d’un mépris institutionnel latent, comme si son existence ne méritait ni reconnaissance juridique ni considération budgétaire.

Les cadres de ces écoles, qu’ils soient enseignants, responsables ou administrateurs, vivent dans une précarité indigne de leur mission. Ils n’ont pas de statut clair, pas de droits sociaux garantis, et dépendent de bourses versées de manière irrégulière par le ministère. L’Etat leur confie une responsabilité essentielle — préserver une partie de l’identité nationale — tout en les reléguant à la périphérie des priorités politiques. Cette contradiction, a martelé Majida Chahid, est à la fois injuste et contre-productive.

Face à cette situation, la députée a exigé du ministère des Habous une réponse précise : quelles réformes structurelles compte-t-il entreprendre pour régulariser et revaloriser les cadres des écoles traditionnelles ? Et surtout, entend-il enfin donner à cet enseignement la place qu’il mérite dans le paysage éducatif marocain ?
 
Un double cri d’alerte, un seul enjeu

Ce double plaidoyer, porté par deux voix féminines de l’opposition ittihadie, a ceci de remarquable qu’il ne cède ni à l’idéologie ni à l’effet de manche. Il pose, avec calme et gravité, les vraies questions que se pose aujourd’hui une société en pleine transition : quelle école voulons-nous? Pour qui ? Et à quel prix?

Faut-il créer des écoles vitrines en sacrifiant l’équité territoriale ? Faut-il vanter l’innovation tout en bradant la liberté pédagogique ? Faut-il préserver les traditions sans offrir à ceux qui les portent des conditions de vie décentes?

Autant d’interrogations qui méritent mieux que des réponses techniques. Elles exigent une vision. Car sans une volonté politique claire, articulée autour d’un impératif de justice éducative, aucune réforme ne tiendra ses promesses. Ni celles des écoles «Riada», si elles deviennent un outil de sélection masquée, ni celles des «madaris atiqa», si elles continuent d’exister aux marges de l’indifférence.

Ce qui est en jeu, au fond, c’est l’avenir même du pacte social marocain : une école qui unit ou une école qui divise. Une école qui élève ou une école qui exclut. À l’heure des bilans, les réponses à ces questions ne relèveront pas des chiffres, mais des choix. Politiques. Humains. Nationaux.

Mehdi Ouassat


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